Au cours des XVIII^e et XIX^e siècles, tout un pan de l’action politique s’est trouvé délégitimé par les gouvernements et les secteurs dominants de la société, au profit d’une définition du politique s’inscrivant dans le cadre pacifié et normé, défini par les États comme étant celui du débat public. À partir de l’analyse de cas précis, ce dossier étude ces pratiques politiques peu visibles car a priori en dehors de l’espace politique institutionnalisé, et propose ainsi un élargissement en aval et en amont de la chronologie désormais bien établie de l’âge des révolutions.

Le détroit de Gibraltar a été progressivement façonné par les pouvoirs qui l'ont dominé, aussi bien à l'aide d'acteurs (gouverneurs, délégués militaires ou civils) que de territoires (cités, ports, arsenaux). Quoique le choix d'une administration propre intégrant ses deux rives ait été l'exception, ce deuxième ouvrage de la série DÉTROIT questionne le rôle de cet espace dans la construction des empires dans la longue durée, de la domination punique jusqu'à la chute de Grenade.

La distance et sa gestion constituent un enjeu fondamental pour comprendre la configuration des monarchies des vastes empires ibériques entre le XVIe et le XVIIIe siècle. Au-delà de la simple séparation physique entre les habitants des territoires européens et ceux des territoires d'outre-mer, cette distance se révèle également sociale, culturelle, politique et même temporelle. Les mécanismes utilisés par les acteurs impériaux pour établir leur domination sur ces vastes territoires, la façon dont ils ont perçu et conçu ces distances, comment ils les ont vécues et comment ils ont gouverné pour les surmonter sont analysés dans cet ouvrage.