LUDICo (Condeixa-a-Velha, Portugal)
Le quartier des spectacles de Conimbriga

Situé au nord de la ville antique, l’amphithéâtre de Conimbriga aurait été construit dans la ville au début du Ier s. apr. J.-C., puis exclu de l’emprise de la cité tardo-antique au début du IVe s. L’amphithéâtre constituait le monument le plus visible du quartier nord de la ville, mais il n’était pas isolé. L’exploration archéologique des environs immédiats de l’édifice depuis le XIXe s a permis de mettre au jour plusieurs habitations, un réseau viaire et hydraulique, ainsi que d’autres édifices publics et une partie de la muraille tardo-antique. Les observations récentes menées en 2021 ont permis de mettre en évidence l’existence probable d’un quartier des spectacles, similaire à ceux présents dans plusieurs villes occidentales du Haut-Empire comme à Lyon ou à Autun, associant plusieurs types d’édifices consacrés aux jeux. L’objectif du projet LUDICo est à la fois d’étudier les monuments présents dans le quartier de l’amphithéâtre, mais aussi d’en préciser l’extension et la chronologie.

Historique des fouilles

La ville de Conimbriga constitue l’un des sites majeurs du Portugal en raison de l’état de conservation exceptionnel de ses vestiges. Situé à une vingtaine de kilomètres au sud de la ville actuelle de Coïmbre, le site archéologique est fouillé depuis le XIXe s. Les quartiers est de la ville ont fait l’objet d’importantes campagnes de restauration par l’ancienne Direcçao Geral dos Edificios e Monumentos Nacionais (DGEMN) dans les années 1930. Un important fonds photographique, aujourd’hui conservé dans le fonds de l’ancienne DGEMN à Sacavém et à la Direção Geral do Patrimonio Cultural (DGPC) à Lisbonne, rend compte de ces travaux.

Des années 1960 à 1970, la fouille a été étendue au centre monumental de la cité et à quelques maisons par une équipe luso-française dirigée par les professeurs Jorge Alarcão et Robert Etienne. Plusieurs campagnes ont été ponctuellement réalisées ensuite par des équipes du Musée Monographique de Conimbriga, de l’université de Coïmbre ainsi que de l’université Autonóma de Madrid. Elles se poursuivent actuellement sous la direction du Musée, en étroite collaboration avec l’université de Coïmbre.

Le site a fait l’objet de plusieurs publications, consacrées notamment à son architecture publique, comme en témoignent les huit volumes des Fouilles de Conimbriga rendant compte de l’activité conjointe des archéologues portugais et français. Ces dix dernières années, Conimbriga a bénéficié de recherches constantes qui ont permis de mieux connaitre l’architecture domestique, la gestion de l’eau dans la cité et les occupations tardives et médiévales qui n’avaient pas été prises en compte lors des fouilles précédentes. L’occupation du site à cette époque a été notamment soulignée par les travaux d’Adriaan de Man sur l’enceinte tardo-antique de la cité.

Malgré ces recherches, il n’a pas encore été possible de comprendre les relations entre plusieurs composantes du quartier nord de la ville antique, dont les modalités d’intégration restent incertaines. Ce secteur jouait pourtant un rôle déterminant dans l’organisation de la ville du Haut-Empire en accueillant certains des édifices les plus imposants de la cité. Bien que rejeté hors de l’enceinte tardo-antique construite au début du IVe s., le quartier de l’amphithéâtre s’est ensuite présenté comme une charnière entre l’ancienne cité abandonnée à partir du VIe s. et le village médiéval de Condeixa-a-Velha.

Projet

L’étude du quartier des spectacles de Conimbriga a pour objectifs d’aborder le développement de la ville antique et de ses infrastructures durant le Haut-Empire, d’étudier la réduction de l’emprise urbaine de la cité durant l’Antiquité tardive et son évolution durant le Haut Moyen-âge.

Le projet LUDICo : le quartier des spectacles de Conimbriga s’intègre plus largement aujourd’hui au plan d’exploration archéologique du site mené par le Museu Monográfico de Conimbriga (MMC). Ce projet traite plus particulièrement des principales structures (monuments) et infrastructures (voies et réseaux d’égout) organisant le quartier des spectacles.

Les premières campagnes d’étude viseront à exploiter le résultat des prospections géophysiques recemment menées et à enregistrer l’ensemble des vestiges déjà visibles dans le quartier des spectacles Une seconde phase sera constituée par l’exploration archéologique de la zone située entre l’amphithéâtre et la Maison aux jets d’eau afin d’identifier formellement les structures monumentales visibles et d’obtenir une première estimation de la chronologie du monument associée à une analyse du bâti relevé. Enfin, une troisième phase verra l’extension de l’exploration archéologique du secteur, afin de proposer une synthèse sur le quartier des spectacles de Conimbriga de l’Antiquité au Haut Moyen âge.

Le projet LUDICo, traitant de l’évolution d’un quartier de spectacle au sein d’une ville antique, s’intègre à la fois dans l’axe I – Cité, communauté, conflictualité et dans l’axe III- Patrimoines, héritages, réécriture. L’histoire des monuments de spectacles reflète souvent une compétition entre différentes communautés car ils constituent un espace de concurrence entre les évergètes et forment un espace de représentation des pouvoirs dans la cité. Le site archéologique de Conimbriga, ayant joué tour à tour le rôle de vitrine archéologique du Portugal sous le régime salazariste, puis de laboratoire de la collaboration scientifique européenne lors des fouilles franco-portugaises permet également de réfléchir aux statuts et aux relectures possibles d’un patrimoine d’un régime politique à un autre.