Les épistoliers wisigothiques

Plusieurs missives sont uniquement connues par des éditions anciennes, dépassées d’un point de vue scientifique, parfois fautives et difficilement accessibles. Nombre d’épistoliers de l’Espagne wisigothique demeurent ainsi mal connus, alors même que leurs lettres constituent des sources historiques de premier ordre. Outre les quatre lettres échangées entre Quiricus de Barcelone et Ildephonse de Tolède, il s’agit surtout de trois lettres de Licinien de Carthagène, un des grands évêques de son temps, à caractère théologique ou ecclésiastique, destinées à Epiphane, à Vincent d’Ibiza et au pape Grégoire le Grand. Leur édition s’avère indispensable car celle de José Madoz (1948) ne prend pas en compte tous les manuscrits connus. Pire encore, trois des treize lettres du grand évêque Isidore de Séville à Claude, à Eugène et à Redemptus, ne sont connues que par une édition réalisée au XVIIIe siècle par F. Arévalo et reprise au siècle suivant par l'abbé Migne (PL 83). Bien que bénéficiant d'éditions plus récentes, les dix autres mériteraient aussi quelques améliorations par une meilleure sélection des leçons, notamment les six lettres à Braulion de Saragosse, celle au roi Sisebut et surtout celle à Helladius (éditée par Gundlach dans les Monumenta Germaniae Historica).

Les correspondances pontificales, épiscopales et royales

Avant 711, quand commence la collection Iberia Pontificia actuellement en cours d’édition, la correspondance pontificale constitue une partie essentielle du corpus épistolaire conservé. Elle mériterait d’être recensée, y compris au travers des simples mentions relevées dans l’historiographie et le droit canon. Par ailleurs, certaines lettres demanderaient à être rééditées. En outre, si plusieurs fragments de correspondances épiscopales sont conservés pour la période wisigothique, les lettres de rois ou de grands laïcs demeurent extrêmement rares. Ainsi, plusieurs années après sa conversion (587-589), le roi Reccarède adresse-t-il une lettre à Grégoire le Grand pour l’informer de sa décision, lettre dont l’édition remplacera celle des MGH. De même, bien qu’elle soit de nature composite, la collection des Epistolae wisigothicae (18 à 20 lettres en tout) présente l’intérêt majeur de transmettre un nombre non négligeable de ces pièces pour la première moitié du VIIe siècle, notamment celles du comte Bulgar et du roi Sisebut. L’établissement du texte est particulièrement complexe car le codex d’Oviedo, qui transmettait la collection, a disparu. En conséquence, la teneur n’en est connue que par des copies d’érudits de l’époque moderne et par deux manuscrits médiévaux. Or l’édition des MGH est loin d’être satisfaisante. Les efforts de correction du texte proposés dans les années 1970 par Juan Gil seront donc poursuivis, notamment en comparant les lettres à des pièces similaires de provenance franque.

Les lettres liées à la querelle adoptianiste

Un travail d’édition s’avère aussi indispensable pour étudier à la fin du VIIIe siècle la querelle adoptianiste dont la particularité est de s’être joué, pour l’essentiel, sur le mode épistolaire. Hormis Alcuin et Félix d’Urgel, jamais les protagonistes de cette affaire d'hérésie en terre ibérique ne se sont rencontrés. L’archevêque de Tolède Elipand et son collège épiscopal, Félix d’Urgel, Beatus de Liebana, Alcuin, Paulin d’Aquilée, Charlemagne et le pape Hadrien Ier débattirent exclusivement par écrit durant plus d’une décennie. L’essentiel de cette correspondance est parvenu jusqu’à nous disséminée dans plusieurs manuscrits d’origine et d’époque très différentes. Les pièces qui la composent ont toutes fait l’objet d’éditions plus ou moins récentes qui n’ont jamais été rassemblées en un même volume et nécessitent de nouvelles datations et des améliorations éditoriales.