Projet OLEASTRO
OLEiculture et production d’AmphoreS en Turdétanie ROmaine

Les objectifs scientifiques du programme OLEASTRO, qui succède au programme triennal PAEBR (2013-2015) du LabEx Archimede, consacré à la vallée du Genil, sont multiples et concernent la problématique générale des interactions entre les activités économiques et l’évolution de l’environnement.

Il s’agit d’appréhender sur la longue durée, à partir du cas spécifique de l’industrie potière de la vallée du Guadalquivir (province de Bétique), la partie du territoire du sud de l’Hispanie désignée par les auteurs grecs et latins sous le nom de Turdétanie, quelles ont été les stratégies de développement mises au point pour répondre aux stimulis d’une économie spéculative florissante liée en grande partie à la production et à la diffusion vers Hispalis (Séville) de l’huile d’olive contenue dans les amphores Dr. 20. L’huile a assurée pendant toute l’époque romaine, avec d’autres produits agricoles et les minerais, l’enrichissement des classes dominantes locales, selon un processus bien mis en évidence par F. Jacques, G. Chic Garcia et F. des Boscs notamment.

Nous partons du postulat que cette activité a pu avoir un effet dévastateur sur le milieu en raison de son intensité — on se trouve ici en présence de la plus forte densité d’ateliers connue dans l’Empire romain — et de son amplitude chronologique. Comment a été assuré l’approvisionnement en combustible de cet immense agrégat d’ateliers que l’on peut qualifier, pour la plupart, d’industriels ? Quelles sont les réponses techniques apportées par les producteurs d’amphores à la demande toujours croissante de conteneurs ? Comment étaient organisés ces centres de production ? Existait-il une forme de rationalité des outils de production et de leur organisation destinée à maitriser les effets de cette activité sur l’environnement ? Quels étaient les liens entre huileries et ateliers d’amphores ? Quelles étaient les variétés d’olive à huile produite et peut-on discerner une évolution des types choisis en fonction de leur productivité ?

Autant de questions auxquelles voudrait répondre ce projet grâce à la mise en place, sur un territoire atelier où se trouvent au moins 80 centres de productions, d’un protocole de travail rigoureux permettant une modélisation pluridisciplinaire parmi laquelle une approche morphométrique de l'agrobiodiversité de l'olivier ainsi qu’une analyse chronologique s’appuyant sur le logiciel « Chrono-modèle ». Le travail de recherche va s’organiser, en parallèle, sur le territoire des deux conventus de la basse vallée du Guadalquivir : celui de Hispalis/Séville situé entre Palma del Rio et Séville ; celui de Cordoba qui se trouve à l’amont de Palma del Rio et remonte jusqu’à l’agglomération de Cordoue. Comme le conventus d’Astigi/Ecija, les deux conventus d’Hispalis et de Cordoba correspondent à des zones possédant une juridiction propre et exercent sur le commerce des Dr. 20, un contrôle attesté sur les marques peintes sur Dr. 20. Ces trois zones de production semblent, d’après la confrontation des résultats du programme PAEBR et les travaux préliminaires engagés en 2015, avoir leurs propres spécificités et l’un des objectifs d’OLEASTRO est justement de confronter et d’analyser les résultats obtenus dans ces trois zones de production d’amphores.

A partir des méthodologies mises en place lors du programme PAEBR (LabEx Archimede, 2013/2015), on se propose de dresser un inventaire argumenté et détaillé de l’ensemble des ateliers d’amphores Dr. 20 et d’huileries situés sur les berges du Guadalquivir, à partir de campagnes de prospections de surface (la première a commencé en février 2016 avec une aide spécifique du LabEx apporté à Q. Desbonnets), de campagnes de survol par drone et de prospections magnétiques ciblées sur quelques ateliers. On procédera également à la fouille ciblée de deux ateliers et l’on poursuivra le travail de datation archéomagnétique des fours dégagés. Sur les ateliers fouillés, l’accent sera mis sur la collecte de données paléoenvironnementales bien datées afin d’établir des comparaisons avec les résultats de Las Delicias (en cours de finalisation ; résultats définitifs attendus au printemps 2016). Ces recherches seront pilotées par S. Mauné, E. Garcia Vargas, O. Bourgeon (méthodologie), Q. Desbonnets (zone Palma del Rio/Séville), I. Gonzalez Tobar (zone Cordoue/Palma del Rio) et C. Dubler (diffusion et chronologie des timbres). Elles bénéficient d’ores et déjà de trois allocations de recherches doctorales de trois ans (OB, QD et CD) et des collaborations pluridisciplinaires (cf. infra) mises en place à l’occasion du programme PAEBR.

OLEASTRO constitue un programme de recherche à résolution courte dont l’originalité vient de sa structuration autour de thèses inscrites en co-tutelle, du recours à la pluridisciplinarité et d’une mise en réseau, pour confrontation, des résultats.